L’école du dehors en Bretagne | REEB Journée d’échanges 2020

Instantané de la journée d’échanges REEB 2020 : éducation nature et coronavirus

À la sortie du confinement, de nombreux professionnels de l’éducation ont montré de l’intérêt pour organiser l’école dehors. À la fois une alternative aux lourds protocoles sanitaires mis en place en salle de classe et une chance pour promouvoir l’éducation dans la nature, il est primordial pour les acteurs de l’éducation à l’environnement en Bretagne d’être moteurs dans cette démarche.
Comment organiser la classe dehors avec le coronavirus ? Quelle est la place de l’animateur nature dans les écoles de Bretagne aujourd’hui ? Que deviennent les centres de classes de découverte ? Autant de questions soulevées lors de la journée d’échanges du 28 août dernier à la Chapelle-Neuve. Les participants ont pu témoigner de leurs réussites et de leurs difficultés pour exercer suite à la crise sanitaire liée au Covid-19.

Partage d’expériences à l’école du dehors en Bretagne

Organiser une rencontre dans le contexte de crise sanitaire

Voici un an que le plan d’actions régional "Éduquer à et dans la Nature en Bretagne" a été édité. Pour dresser le bilan de cette première année d’application, le REEB, l’UBAPAR et Bretagne Vivante ont organisé conjointement une journée d’échanges sur l’éducation à et dans la nature à la Chapelle-Neuve fin août. L’objectif était de partager les expériences des professionnels de l’éducation à l’environnement en Bretagne, et notamment dans le contexte de crise sanitaire. Seize participants ont ainsi pu être accueillis au Centre forêt bocage. La journée s’est structurée avec :

  • des groupes d’interviews tournantes ;
  • le visionnage du film « éduquer et enseigner dehors » du GRAINE Bourgogne Franche-Comté, suivi d’un débat ;
  • des ateliers de productions collaboratives ;
  • un temps collectif pour la restitution finale.

Un premier constat a été établi durant la matinée : quels que soient les publics rencontrés lors des animations qui ont pu être organisées cet été malgré le coronavirus, être dehors, dans un environnement naturel, leur a procuré un profond sentiment de bien-être, physique et psychologique. Néanmoins, il s’est exprimé parfois une certaine peur de la nature et du jugement par autrui en pédagogie subjective (projet artistique entre autres).

Faire émerger ensemble les problématiques actuelles

Les différents exercices auxquels se sont prêtés les participants lors de cette rencontre ont fait émerger des problématiques communes aux professionnels de l’éducation à l’environnement. Il est ressorti notamment :

  • Qu’il n’est pas facile pour les enseignants d’accepter le jeu libre comme une approche pédagogique à part entière, comme d’autres pédagogies alternatives ;
  • Que de moins en moins d’enfants connaissent et voient la nature de façon positive, y compris à la campagne ;
  • Que le manque de formation des enseignants et d’une vision collective de l’école empêche les éducateurs et les animateurs nature de trouver une place bien définie dans le système éducatif ;
  • Que la « contre-naturalité » de notre société, la lourdeur des démarches administratives et les parents d’élèves procéduriers ne favorisent pas les activités de pleine nature.

Malgré la reconnaissance par les élus, et notamment de la région Bretagne, de l’importance d’une éducation à l’environnement par des spécialistes, le constat est sans appel : les acteurs de l’éducation non-formelle ne sont pas considérés comme des partenaires de l’Éducation nationale. Dans cette situation de crise sanitaire, aucune information sur les conditions d’accueil et d’intervention en classe ne leur parvient. D’autre part, aucun communiqué ne leur est parvenu au sujet de la fusion de la Jeunesse et des Sports au sein du ministère de l’Éducation nationale. La question de la reconnaissance des métiers d’éducateur et d’animateur nature est donc primordiale.

Éducation nature en Bretagne et Covid : pistes de réflexions

Laisser une place à la nature dans son école

Pour accompagner les enseignants vers un véritable partenariat avec les acteurs de l’éducation nature, une première étape peut être d’accueillir un coin de nature au sein même des établissements scolaires. Ce support pédagogique concret est complémentaire aux sorties et classes de découvertes. Il est également essentiel en période de crise sanitaire pour maintenir un contact, même fugace, avec l’environnement extérieur.


Voici des exemples de projets possibles :

  • créer et entretenir un potager ;
  • construire une cabane en bois ;
  • tresser du saule vivant ;
  • planter un arbre ;
  • imaginer un parcours artistique avec des créations naturelles ;
  • concevoir un suivi scientifique ou naturaliste d’une parcelle fleurie.

Différentes méthodes pédagogiques peuvent être employées grâce à ce type de ressource :

  • un suivi chronologique avec des observations et des interventions régulières ;
  • des rituels saisonniers ;
  • des jeux libres où les enfants opèrent les choix, car leur donner du temps est nécessaire pour qu’ils s’approprient un nouvel espace et retrouvent des rythmes naturels.

Utilisées tour à tour, ces techniques aident à identifier les freins propres à chaque élève. Laisser aux enseignants le temps d’observer leurs élèves permet de lever leurs propres réticences.


Pour pérenniser un tel projet, malgré le changement d’équipes pédagogiques ou le renouvellement des élèves, il est primordial de mobiliser l’ensemble du corps enseignant présent ainsi que la municipalité.


De plus, pour proposer l’installation d’un coin de nature dans une école, il convient d’envisager en tant qu’acteur de l’éducation environnement de :

  • se former à l’aménagement des cours d’école (voir la méthodologie oasis) ;
  • mener une analyse « risques »/« bénéfices » des aménagements existants pour construire son argumentaire ;
  • mettre en place des formations pour accompagner les porteurs de projets.

Classe dehors et Covid-19 : besoin d’accompagnement

De plus, pour proposer l’installation d’un coin de nature dans une école, il convient d’envisager en tant qu’acteur de l’éducation environnement de :

  • se former à l’aménagement des cours d’école (voir la méthodologie oasis) ;
  • mener une analyse « risques »/« bénéfices » des aménagements existants pour construire son argumentaire ;
  • mettre en place des formations pour accompagner les porteurs de projets.des enseignants

En plus des enseignements dispensés en intérieur, organiser la classe dehors demande un surcroît d’énergie aux enseignants, compte tenu :

  • des démarches administratives à effectuer ;
  • du matériel et de l’équipement à prévoir pour les élèves ;
  • du repérage à mener pour trouver le site ;
  • du trajet à aménager pour y parvenir ;
  • du contenu de l’enseignement à adapter.

En période de crise sanitaire, confrontés à des difficultés supplémentaires (respect de la distanciation sociale, du port du masque et des autres gestes barrières), il est d’autant plus important aujourd’hui d’accompagner les enseignants qui souhaitent organiser l’école dans la nature. Ensemble, il convient de définir le niveau de gradient de nature nécessaire pour susciter l’intérêt et le bien-être des élèves comme du corps enseignant.

Pour mener la classe dehors facilement, et notamment en ces temps troublés, il est possible :

  • de s’approprier un coin de nature au sein de l’établissement scolaire ;
  • de suggérer à l’enseignant de faire un cours classique dehors plutôt que dedans ;
  • de proposer aux enfants de prospecter autour de chez eux, en participant par exemple à des actions locales de sciences participatives pour redécouvrir la nature de proximité ;
  • de rédiger une charte entre enseignant et animateur pour définir la posture de l’enseignant pendant l’animation ;
  • de limiter le matériel et de favoriser les outils individuels ;
  • de mettre en place des supports pérennes, en partenariat avec la commune, pour l’observation de la biodiversité.

En développant une pédagogie du dehors et des méthodes alternatives à l’enseignement classique, les enfants, en plus de parfaire leurs connaissances de la biodiversité et de l’environnement :

  • s’initient à la marche ;
  • explorent l’environnement de l’école, parfois inconnu pour les habitants des communes voisines ;
  • se recentrent et s’ancrent durablement sur le territoire ;
  • développent savoir-faire, savoir-vivre et savoir-être.

Enfin, pour valoriser le travail réalisé par les enfants et les enseignants, les intervenants peuvent communiquer sur les sorties via la presse locale, avec des textes préparés en amont. Après une classe menée dehors, l’école peut aussi proposer un article pour montrer les bénéfices des nouvelles pratiques qu’elle a mises en place.

Devenir des partenaires de l’Éducation nationale

Améliorer les relations entre acteurs de l’environnement et Éducation nationale

Les instances représentatives de l’Éducation nationale évoluent et leurs manières de procéder avec elles. Aussi est-ce difficile de communiquer et de collaborer avec ses représentants, pour permettre la reconnaissance de l’éducation environnementale.




Afin d’améliorer les échanges entre les acteurs de l’environnement et de l’Éducation nationale, il convient :

  • d’interroger les instances existantes (comité de pilotage Éducation et Développement Durable, plateformes régionale EEDD, etc.) ;
  • de réaliser une cartographie des acteurs partenaires pour connaître l’identité et les missions de chacun ;
  • de faire un état des lieux des dysfonctionnements, au regard de ce qu’est être partenaire et de ce que cela implique dans les relations ;
  • de redéfinir le partenariat avec ces acteurs-administrateurs allant jusqu’à la convention et l’acte d’engagement ;
  • de synthétiser et de mettre en lumière les résultats d’études sur les bénéfices apportés par les classes de découverte ;
  • de réaliser des films sur l’école du dehors, de la préparation à l’exploitation en salle de classe ;
  • de compiler les films et les ouvrages existants sur le sujet ;
  • de travailler avec les syndicats d’enseignants et les fédérations de parents d’élèves ;
  • d’étudier les exemples de partenariats à l’étranger.

Reconnaître les animateurs nature et la pédagogie du dehors

Mis en exergue par la crise du coronavirus, l’un des enjeux majeurs pour les animateurs de l’éducation à l’environnement est d’être reconnus comme des partenaires à part entière des acteurs de l’Éducation nationale. En effet, pour exercer dans de bonnes conditions, des réflexions doivent être menées sur le contenu de la formation des enseignants et le rôle des éducateurs et des animateurs nature dans cette formation.


Un premier état des lieux de la situation permettrait de comprendre le fonctionnement de la formation des enseignants. Des rencontres sont à prévoir avec :

  • la Délégation Académique à l’éducation Artistique et Culturelle de Bretagne ;
  • Crystèle Ferjou de l’Académie de Poitiers ;
  • le Graine Bourgogne Franche-Comté ;
  • le Réseau École et Nature ;
  • le Réseau associatif régional d’éducation à la nature et à l’environnement en Alsace (ARIENA) ;
  • les conseillers pédagogiques par circonscription ;
  • les responsables pédagogiques de l’enseignement privé.

Pour promouvoir les actions de l’éducation à l’environnement lors de ces rencontres, il est nécessaire de :

  • rassembler la communication existante : filmographie, bibliographie et résultats d’études dont la recherche-action « Grandir avec la nature » ;
  • établir une synthèse des données de chacun lors de ses interventions ;
  • négocier la projection du film du GRAINE Bourgogne France Comté à la rentrée pour les enseignants.

Conclusion :

L’éducation à et dans la nature en Bretagne est soutenue par de nombreux acteurs associatifs engagés - REEB, UBAPAR, Bretagne Vivante et beaucoup d’autres – et tend à l’être par les représentants de l’Éducation nationale. La crise sanitaire que nous traversons actuellement conforte le bien-fondé de l’organisation de la classe dehors, tant pour les valeurs humaines et sociétales qu’elle transmet que pour les conditions sanitaires, rassurantes et originales qu’elle offre.


Vous êtes enseignant, professionnel de l’éducation ? Vous souhaitez vous aussi participer à l’école du dehors ? Vous pouvez prendre contact avec les membres de notre réseau et rejoindre notre dynamique pour plus de naturalité dans l’éducation de nos enfants.

Céline LE BRIAND